L’extrême beauté gaspésienne et ses multiples attraits
J’avais oublié comment elle était magnifique et grandiose, cette Gaspésie! Je l’avais connue tout d’abord avec mes parents en camping, puis à l’adolescence « sur le pouce » avec une amie.
Cette fois, j’ai pu y découvrir plus en profondeur les charmes d’une nature incomparable par sa diversité : mer et montagnes s’y côtoient avec bonheur. Qui plus est, la vitalité et la créativité légendaires de ses habitants m’ont émue. Rien n’est jamais facile ici, autant l’éloignement des grands centres que les caprices de la mer et du climat qui change. Mais tout cela stimule et vivifie, comme l’air frais qu’on y respire!
Percé, la légendaire
Dramatique et rebelle, Percé a toujours fasciné les visiteurs avec son rocher en forme de paquebot troué. Le jour de mon arrivée, en septembre dernier, la brume, le vent et la pluie faisaient vibrer d’intensité ce village pourtant bien calme par beau temps. Première impression : l’odeur de varech et de sel nous inonde tel un effluve enivrant et si dépaysant pour nous, résidents des régions d’eau douce. À deux pas du quai, visite du musée Le Chafaud où est illustrée l’histoire de la pêche à la morue qui a fait la fortune de la famille Robin, originaire de l’île de Jersey, en Europe. Anecdotes et photos sont savamment présentées pour nous faire revivre cette saga de l’époque où la morue était d’une abondance sans limites. Pour compléter notre éducation, au village de L’Anse-à-Beaufils, situé à quelques kilomètres de là, un magasin général authentique de 1928 a été recréé et la visite guidée remplie d’humour est un must. Pour terminer l’après-midi : dégustation d’une bonne bière brassée localement, au café-bistro La Vieille Usine, situé à deux pas du quai de la marina.
Le Riôtel Percé nous accueille chaleureusement pour le souper composé de poissons frais et nous offre le coucher avec vue sur la mer, face au rocher. Magique, avec le son des vagues et du vent pour s’endormir.
Le lendemain matin, la météo se faisant plus clémente, départ à 8 h sur le quai vers l’île Bonaventure, à bord du traversier qui fait la navette régulièrement chaque heure. La brume se lève et laisse entrevoir le gigantesque rocher qui surgit tel un fantôme… Dès l’arrivée sur l’île, la randonnée sur l’un des quatre sentiers (La colonie) débute en compagnie du guide qui nous explique la géologie, la faune et la flore pour enfin arriver au but ultime : la colonie des fous de Bassan, les fameux oiseaux emblématiques du lieu, la plus grosse réserve mondiale de ces oiseaux. Ils sont des milliers à croasser, chacun défendant avec vigueur son territoire. Année après année, ils y reviendront après leur migration vers le nord.
Le plus long sentier comprend la visite des maisons des villégiateurs, acquises en 1971 par le gouvernement du Québec. On apprend aussi qu’un célèbre corsaire, nommé Peter Du Val, s’y est établi à partir de 1819 à titre de commerçant de poissons après avoir bourlingué sur l’Atlantique comme capitaine de navires marchands. Sa descendance y a vécu plusieurs décennies.
Air pur, mer, horizon infini et liberté
Tous les sens sont touchés en Gaspésie : le goûter, évidemment, avec les délicieux fruits de mer et poissons fraîchement pêchés. Il y a aussi le paysage qui, de tous les côtés de la péninsule, offre la mer en arrière-plan. À l’intérieur, le parc national de la Gaspésie, avec sa forêt dense, est idéal pour la randonnée pédestre et le ski de fond grâce à ses nombreux sentiers bien balisés et surveillés. Cela offre une diversification des activités qui assure aux visiteurs un émerveillement continuel et une liberté, sans craindre les embouteillages. Pour les marins, il va de soi que la mer est le premier centre d’intérêt : plongée sous-marine à Percé et à Sainte-Anne-des-Monts, pêche au homard à Percé, pêche touristique libre sur les quais des villages côtiers, kayak de mer, etc.
Le nautisme est bien vivant dans la baie des Chaleurs
À Bonaventure, dans la baie des Chaleurs, le commodore de la marina, Ambroise Henry, annonçait en primeur, lors de sa réunion en septembre dernier, un montant de 775 000 $ provenant de différentes sources de financement afin d’acquérir de nouveaux pontons usinés qui seront opérationnels dès 2014. Cela portera la capacité de la marina à 70 places à quai. Abritée dans le havre naturel de Beaubassin, la marina est à l’abri des intempéries et offre plusieurs services. Des activités culturelles, une magnifique plage et un café sont aussi à proximité. Selon M. Henry, cet investissement est la première phase d’un projet qui consiste à améliorer continuellement les installations. Située à 15 milles nautiques de là, la marina de New Richmond rénovera complètement sa capitainerie pour la prochaine saison. Au total, ce sont 1,2 M$ qui sont investis dans les marinas de la baie cette année. La voile est un sport qui gagne en popularité et les conditions sont excellentes. « Nous avons 14 nouveaux membres cette année », ajoute M. Henry. Plusieurs jeunes familles et des professionnels l’adoptent. Des retraités et villégiateurs s’y adonnent aussi, les coûts des services y étant très abordables.
En passant à Bonaventure, nous constatons que les Gaspésiens ont une imagination débordante : le vin de fraises Bourdages est un vrai succès. Rencontre avec l’un des deux fils de cette famille de cultivateurs de fraises, qui s’est lancée dans la production d’alcool de fraises : apéro, vin et digestif. Résultat : un goût très intéressant et une recherche constante pour trouver de nouveaux produits. Voilà bien l’esprit d’initiative et l’audace typique des Gaspésiens.
Le Riôtel Bonaventure est ouvert durant l’été. Il ferme en hiver, tout comme celui de Percé. Sa proximité de la mer le rend très apprécié auprès des visiteurs. Les couchers de soleil y sont magnifiques et la table d’hôte exquise. Le chef, d’origine française, a cuisiné un filet de flétan frais ainsi qu’une crème brûlée au sirop d’érable et pommes confites que je n’oublierai jamais, tant ces deux plats étaient savoureux.
La visite au Bioparc, le jardin animalier de la Gaspésie, à Bonaventure, où les animaux sont en semi-liberté (ours, lynx, renards, cerfs de Virginie, caribous, etc.), fut l’occasion d’une belle promenade fort instructive avec des guides qui répondent parfaitement à nos nombreuses questions. Idéal pour les petits enfants et les grands aussi!
Le parc national de la Gaspésie
Tout en longeant la rivière Cascapédia à partir de New Richmond, où les pêcheurs taquinent le saumon, nous voici au parc national de la Gaspésie. Au Centre des découvertes, Pascal Lévesque, le directeur du parc, un véritable connaisseur et amant de la nature, nous guide vers les plus beaux points de vue. Les monts Chic-Chocs et McGerrigle traversent les 802 km2 du parc. Plus de 25 monts dépassent les 1000 mètres d’altitude. La diversité d’espèces fauniques est unique au Québec et même au monde, notamment le caribou montagnard et les plantes arctiques alpines. Plusieurs types d’hébergement y sont possibles : du luxueux Gîte du Mont-Albert au camping aménagé ou rustique.
Après une demi-heure de route du parc, voici Sainte-Anne-des-Monts, en bordure du fleuve Saint-Laurent.
Sainte-Anne-des-Monts veut sauver son quai
Ville magnifique avec son église qui pointe fièrement ses deux clochers vers le ciel, face au fleuve : nous sommes à Sainte-Anne-des-Monts. Par vent et bourrasques, nous visitons bien au chaud le musée Exploramer, où l’on nous raconte la vie sous-marine du fleuve. Les guides sont d’une très grande érudition et visiblement passionnés par leur travail. Malheureusement, la sortie en mer prévue a été annulée à cause du vent. Cependant, cet imprévu m’a permis de rencontrer le maître de port, Sylvain Gaumont, un personnage courageux et authentique qui veut désespérément sauver le quai de la ville que le gouvernement canadien laisse à l’abandon depuis plusieurs années. Sa dégradation s’accélère d’année en année durant les grandes marées de décembre qui le recouvrent d’eau. Ne reculant devant aucun effort, cet ancien pêcheur répare lui-même les trous et a solidifié un lampadaire avec l’équipement que lui prête la municipalité. M. Gaumont aime profondément sa région et a reçu, tout au long de l’été dernier, plusieurs plaisanciers, notamment l’ancien joueur de hockey Guy Lafleur, sur son bateau moteur de 58 pieds et Archimède, luxueux bateau de 142 pieds appartenant à Steven Spielberg. Dévoué, M. Gaumont est toujours prêt à innover pour permettre au club nautique de 30 membres d’être accueillant. On lui doit le très populaire Festival du maquereau qui se tient en juillet, au grand plaisir des touristes qui pêchent abondamment.
Jointe au téléphone, la mairesse de la ville, Micheline Pelletier, m’a confirmé que le gouvernement fédéral fait la sourde oreille à la demande d’aide pour réparer le quai. « Voilà huit ans, ils (le gouvernement) ont pris la décision d’abandonner notre quai après une grande marée particulièrement dévastatrice qui l’avait enseveli. Ils n’ont pas fait de dragage cette année. » Mme Pelletier m’explique que le fédéral privilégie le quai de la Tourelle, qui dessert les bateaux des pêcheurs. « Notre quai est un symbole de l’appartenance des gens à leur ville, un lieu de rencontre. C’est sacré pour la population! Il pourrait servir encore en le mettant en valeur pour le cabotage, comme autrefois lorsqu’il assurait le transport du sel et du bois. » Mme Pelletier lance un ultime cri d’alarme afin de sauver le quai qui devrait, si rien n’est entrepris, se désintégrer au fil des ans.
Les saumons de Matane
Du vin en Gaspésie? Oui. C’est l’idée originale d’un immigrant d’origine sicilienne qui a voulu recréer un coin de la Toscane avec le vignoble Carpinteri. Nous avons visité le chai et les caves à vin avec le propriétaire, qui est devenu un symbole de réussite. Arrivé au pays en 1971 avec 1 $ en poche, il est maintenant multimillionnaire et heureux comme un roi au milieu de son vignoble. Il reçoit des convives à son luxueux domicile durant la belle saison.
L’attraction principale de Matane provient de sa rivière à saumons et de sa passe migratoire. Puisque cette dernière est située en plein centre-ville, nous pouvons y voir (en été) les saumons qui remontent la rivière afin de se reproduire sur le lieu de leur naissance. Des guides peuvent vous apprendre la technique parfaite pour devenir de bons pêcheurs. Plaisir assuré. Le Riôtel de Matane (la chaîne des trois hôtels Riôtel appartient à la famille Rioux de Matane), où nous avons dormi, offre une vue imprenable sur le fleuve et un confort très apprécié. Sa table est aussi remarquable et il est ouvert à l’année. Il est situé juste à côté de la marina municipale.
Les Jardins de Métis
Un voyage en Gaspésie ne serait pas complet sans la visite des splendides Jardins de Métis en bordure du fleuve Saint-Laurent. Qui plus est, nous avons l’honneur d’en faire le tour avec le directeur, Alexander Reford, l’arrière-petit-fils de la créatrice du site, Elsie Reford. Ouverts depuis 1962 au public, les Jardins ont accueilli plus de 5 millions de visiteurs. Reçue à la villa Estevan, avec un savoureux dîner concocté par le chef Pierre-Olivier Fleury, qui comprenait des fleurs comestibles et légumes cultivés dans le potager, j’étais ravie.
Cinquante-cinq ans après le départ de Mme Reford, une corporation à but non lucratif « Les Amis des Jardins de Métis » assure la préservation et le développement des Jardins. Ils sont classés, depuis 2013, site patrimonial par le gouvernement du Québec. Chaque année, le Festival international de jardins présente des créations originales et insolites qui sont fort amusantes à visiter. Comment ne pas s’extasier devant tant de créativité et de beauté?
Voilà la fin d’une heureuse escapade de quelques jours très intenses!
Référence :
Tourisme Gaspésie : www.tourisme-gaspesie.com
Remerciements à Tourisme Gaspésie pour ce séjour.
Par Monique Reeves
* Reportage publié dans le magazine Printemps 2014 de Québec Yachting.