Une touche du Québec, des Maritimes et du Maine en naviguant sur le M.S. Saint Laurent
Ressentir le contact euphorisant du golfe du Saint-Laurent et de l’océan Atlantique en faisant escale dans des ports où l’histoire maritime, l’air salin et la beauté nous baignent, voilà ce que j’ai vécu durant 10 jours à bord du M.S. Saint Laurent pour son voyage inaugural Montréal-Portland en juin dernier. Scruter la mer, espérer apercevoir une baleine ou des oiseaux de mer, échanger avec les quelque 200 autres passagers aussi intéressés par cette nature grandiose, l’expérience a été intéressante, sauf le temps souvent frais et pluvieux!
Les 90 membres d’équipage dévoués et de toutes origines en étaient visiblement à leurs débuts pour la compagnie, mais ils s’efforçaient malgré tout de satisfaire nos demandes. Le directeur de croisière, Paul Grant, qui chantait à l’occasion des extraits d’opéra au salon en y mettant toute sa passion, réussissait à régler les petits problèmes avec charme et courtoisie. Le capitaine, Georgeios Theodorou, nous a menés à bon port, sans incident. L’anglais était la langue utilisée par la majorité des membres d’équipage, mais quelques serveurs et les préposées à l’information parlaient aussi un très bon français. Somme toute, des petits ajustements et améliorations qui ont été pris en notes par l’administration et devraient être mis en place lors des prochaines croisières.
Un spectacle de qualité qui a séduit les passagers
Exception faite de deux couples en provenance de Montréal, la majorité des passagers étaient des Américains venant de partout aux États-Unis. Quelle ne fut pas ma surprise d’entendre parler « québécois » en arrivant sur le navire amarré au quai Alexandra à Montréal par une chaude journée de la mi-juin… En effet, la chanteuse Roxanne Charette du groupe Souljourn assurait le spectacle durant le voyage. J’ai eu le plaisir de lui parler dès mon embarquement. Cette attachante Québécoise roule sa bosse depuis 20 ans à Nashville au Tennessee avec son conjoint et accompagnateur. Le duo a offert aux croisiéristes une prestation très appréciée, composée de différents succès, passant de la ballade au disco. Le clou du spectacle a été un hommage au groupe The Carpenters, qui a connu de nombreux succès dans les années 70 avec une interprétation exceptionnelle des mélodies de la chanteuse Karen Carpenter, décédée d’anorexie à 33 ans. L’émotion s’est emparée de tous les passagers tant la ressemblance avec cette artiste était palpable, autant sur le plan vocal que physique.
Dan Rather, une vedette du réseau CBS, un journaliste et présentateur de nouvelles très connu des Américains, semblable à Bernard Derome au Québec, était invité spécialement pour cette croisière. Il a pris la parole au grand plaisir des passagers qui écoutaient religieusement ses récits passionnants et teintés d’humour. Un chic type qui a su se donner une retraite active. De plus, un historien, Dr William Cogar, un résident d’Annapolis, présentait des conférences des plus instructives évoquant les nombreuses batailles qui ont eu lieu entre le Canada et les États-Unis durant la guerre d’indépendance américaine. Tout cela dans l’ambiance détendue et confortable du lounge.
Confort et gastronomie
La couette de duvet épaisse et très chaude couvrant mon lit m’a été très utile, car le temps était passablement frais et les cabines donnant sur le pont n’étaient pas munies de portes totalement hermétiques. La décoration intérieure des cabines, du salon et de la salle à manger, très chic et de bon goût, était complétée par les produits de toilette de la marque L’Occitane, un gage de pureté, de douceur et de qualité qui m’a comblée. Luluk, le maître d’hôtel préposé à ma cabine, effectuait un réel tour de force en accomplissant minutieusement son service malgré le vent et le froid qui sévissaient sur le pont.
Le chef cuisinier, d’origine allemande, nous a enchantés avec sa fine gastronomie : potages, entrées, plats principaux composés d’agneau, bœuf et poisson ainsi que des mets végétariens et de délicieux desserts (le meilleur tiramisu jamais dégusté). Le vin servi, souvent californien ou australien, était savoureux. Toutes les consommations à bord (à l’exception de certaines marques haut de gamme) étaient incluses dans le tarif de la croisière, tout comme les excursions.
Le navire
Construit en 2001, dans les chantiers d’Atlantic Marine de Jacksonville, le navire a été complètement rénové au coût de 2 millions de dollars durant l’hiver 2014-2015. Il appartenait à une compagnie qui a fait faillite à la suite de l’effondrement des tours du World Trade Center en 2001. Conçu pour la navigation intérieure, particulièrement sur le Mississippi, il a été repris par Haimark, une nouvelle compagnie dans le domaine des croisières qui a vu le jour il y a deux ans et dont le siège social est à Chicago. Mesurant 87 mètres de long par 15 mètres de large, il est enregistré à Nassau, aux Bahamas. Les cabines sont réparties sur quatre ponts, dont plusieurs avec accès extérieur. La nouvelle vocation du M.S. Saint Laurent est de naviguer sur le Saint-Laurent à partir de Montréal jusqu’aux Grands Lacs et aussi, comme ce fut le cas cette fois-ci, en partance de Montréal vers le Maine en passant par les Maritimes. Sa forme profilée et son petit gabarit sont parfaits pour traverser les écluses de la voie maritime du Saint-Laurent. L’hiver, il se déplacera vers le Sud, notamment le canal de Panama et le Costa Rica, la Colombie, le Pérou et la Floride, spécialement pour les « snowbirds ». La compagnie Haimark possède également cinq autres bateaux de croisière luxueux, de petites dimensions, naviguant dans les rivières du Sud-Est asiatique.
Les escales
Montréal
Pour la majorité des 200 passagers américains (incluant plusieurs agents de voyages) à bord, Montréal fut une très belle découverte et ils ont adoré leur séjour. Un bémol cependant : la gare maritime du quai Alexandra dans le Vieux-Port où était amarré le M.S. Saint Laurent est actuellement dans un état pitoyable et fermée, n’offrant aucune structure d’accueil aux passagers, pas même un seul endroit pour déposer les valises en attendant de monter à bord! Déplorable pour une ville comme Montréal. Il semble toutefois qu’un plan soit dans les cartons gouvernementaux afin de remédier à cette situation. Ce ne sera pas un luxe!
Québec
Redécouvrir le charme de Québec en compagnie d’un guide d’une grande culture a été une des joies de cette croisière. Même en pensant tout connaître de cette cité, j’en ai appris encore! La vieille ville a de quoi impressionner : les plaines d’Abraham, le Château Frontenac, le Petit Champlain, les musiciens ambulants, le Musée de la civilisation, les boutiques raffinées et de bon goût qu’on y retrouve, enfin bref, une ville accueillante et attachante, remplie d’histoire.
Gaspé-Percé
Apercevoir les montagnes encore couvertes de neige en ce début de juin en passant près des côtes gaspésiennes nous a fort bien indiqué la rigueur du climat… Idéalement, on se sentirait mieux ici en juillet! La mer est glaciale, dégageant et accentuant la froidure ambiante. Mais enfin! Nous voici à Gaspé, bref passage avant de joindre Percé en autobus. Ici, les commerces commencent à peine à ouvrir. Plusieurs croisiéristes en profitent pour s’acheter des vêtements plus chauds : tuques et mitaines! Tour de l’île Bonaventure avec les Bateliers de Percé avec vue sur les 300 000 fous de Bassan et petits pingouins nichés sur la paroi abrupte et rocheuse de l’île. Nous sommes à la haute saison des retrouvailles amoureuses. Plusieurs phoques se chauffent au soleil au pied des rochers. Leur nombre augmente d’année en année et ils adorent la morue! Un avant-midi bien rempli de moments magnifiques avant de repartir vers le M.S. Saint Laurent où un délicieux repas nous attend.
Charlottetown
Difficile d’avoir du plus mauvais temps : pluie, vent glacial, voilà le menu du jour de la capitale de l’Île-du-Prince-Édouard. Visite de la ville en autobus, suivie de la découverte de « La petite maison aux pignons verts », du roman de Lucy Maud Montgomery qui s’est inspirée de la région de Cavendish. Un succès mondial, traduit en 17 langues, qui a fait l’objet d’une série télévisée et d’un film. Intéressant, mais voici un commentaire qui traduit assez sommairement mon opinion. « Tout ce chemin pour ça! », disait une croisiériste après la visite de la ferme… Si vous êtes un fan de cette saga romanesque, votre opinion sera sans doute différente!
Halifax
Première base navale de la Marine canadienne, Halifax, la capitale de Nouvelle-Écosse, est une cité consacrée à la mer. Bien située au creux d’une profonde baie, elle a joué un rôle de premier plan lors des deux guerres mondiales en servant de point de départ au ravitaillement des Alliés. Victime d’une gigantesque explosion entre deux navires dans le port, dont l’un était chargé de plusieurs tonnes d’explosifs, la ville a été partiellement démolie le 6 décembre 1917. Plus de 2000 morts et 9000 blessés ont laissé des cicatrices inoubliables. Résilients, les habitants ont surmonté cette terrible épreuve en s’inspirant de cet événement et en l’intégrant à leur histoire. Pour débuter, le bus nous amène faire la visite du Musée de la marine où l’on nous présente des reliques du Titanic, dont le gigantesque escalier de bois, et par la suite, visite du cimetière où sont enterrées une centaine de victimes de ce tragique naufrage. L’émotion nous effleure en songeant à cette nuit horrible du 14 avril 1912, alors que 1500 personnes sont mortes noyées. J’ai aussi marché dans la magnifique Citadelle, un lieu historique de Parcs Canada, située au centre d’Halifax et qui surmonte la ville. Elle a été construite entre 1828 et 1856 par les Britanniques pour protéger la ville. Elle n’a jamais servi! Les touristes la visitent aujourd’hui en grand nombre. Aussi, le jardin botanique de style victorien nous a ravis par sa beauté et ses fontaines.
Yarmouth
Brève visite de Yarmouth, cette petite ville de pêcheurs du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, la région des Acadiens. Nous avons pu y voir de magnifiques résidences en bois, quelques galeries d’artistes, la bibliothèque, une immense plaque de granite à la mémoire des disparus en mer près du port et quelques musées. Un centre d’information touristique fort bien documenté nous renseigne sur la région.
Saint John
Située sur la baie de Fundy, cette petite municipalité dotée d’une magnifique gare maritime « Marco Polo » a gardé beaucoup de son charme vieillot malgré un gigantesque incendie en 1877 qui a détruit une grande partie du centre-ville et du port. Le vieux marché public est un lieu particulièrement animé et intéressant à visiter. L’histoire maritime de la ville est aussi très riche.
Bar Harbor
Nous voici au Maine et à l’avant-dernière journée de la croisière. Côté météo, ça s’annonçait bien, mais un retard de trois heures causé par l’inhabileté des matelots pour descendre la passerelle afin d’accueillir les douaniers américains à bord a causé bien des déceptions. Nous avions cependant le magnifique paysage à contempler en compensation! Bar Harbor et le parc Acadia sont liés. Ils font partie des parcs nationaux américains les plus beaux et les plus visités. La vue au sommet du mont Cadillac est extraordinaire : des milliers d’îles sont dispersées dans une mer bleue rejoignant le ciel! Bar Harbor compte plusieurs boutiques de souvenirs et de nombreux restaurants où le homard est bien présent.
Portland
Dernier jour de cette croisière. Arrivée à 9 h. Nous effectuons un bref tour de cette ville très tendance actuellement, qui abrite certains des meilleurs restaurants et boutiques aux États-Unis. Le bord de mer y est très beau et m’a laissé sur ma faim. J’aurais aimé m’attarder plus longuement ici, profiter de cette vie nocturne très intense, mais ce n’est que partie remise!
En résumé, une ambiance amicale où les rencontres entre passagers, dont la moyenne d’âge était assez élevée, a permis de dialoguer sans souci dans le confort du salon ou de la salle à manger intérieure ou encore celle située sur le pont en admirant le magnifique paysage se dérouler devant nos yeux, parfois incrédules devant une telle beauté. Le Wi-Fi, parfois indisponible, a causé de légers désagréments mais sans trop de conséquence. Je n’oublierai pas ces charmantes compagnes et gentils compagnons, dont Diana de Long Beach en Californie, la doyenne du groupe avec ses 89 ans, qui dansait, riait et s’intéressait à tout! Son secret : soyez positif!
Pour plus d’information : www.haimarktravel.com et www.haimarkline.com
Cette croisière a été rendue possible grâce à l’invitation de Haimark Line.
Par Monique Reeves
*Reportage publié dans le magazine Automne 2015 de Québec Yachting.