Profession : éclusier pour Parcs Canada
S’il y a un métier peu connu, c’est bien celui d’éclusier. Ceux qui opèrent dans les canaux historiques de Parcs Canada au Québec ont accepté de nous raconter leur quotidien et de nous faire découvrir leur incroyable métier.
Pour certains, naviguer sur un canal signifie retrouver année après année un contact familier avec un éclusier auquel ils se sont attachés. Pour d’autres, la présence de l’éclusière se fait rassurante lorsque leur bateau entre pour la première fois dans le sas d’une écluse; il y a autant de sentiments éprouvés au contact d’un éclusier qu’il y a de plaisanciers qui traversent les canaux. Savez-vous en quoi consiste le métier d’éclusier? Ce métier non conventionnel intrigue autant les plaisanciers que les visiteurs en berge. Bien plus que des caissiers ou des préposés à l’ouverture des portes d’un canal, les éclusiers de Parcs Canada sont les experts du fonctionnement des voies navigables, de véritables professionnels de la sécurité et du service à la clientèle, que ce soit dans les canaux de Saint-Ours, Carillon, Chambly, Lachine ou Sainte-Anne-de-Bellevue. En ce début de saison, on vous dresse le portrait de trois de nos collègues qui pratiquent ce métier unique avec passion.
Contrôler le trafic
Indrek Romet, maître-éclusier au Canal-de-Sainte-Anne-de-Bellevue, se décrit auprès de sa famille et de ses amis comme un « contrôleur de trafic maritime ». C’est parfois un travail difficile et stressant selon le trafic du jour. À certains moments, plus de 20 bateaux peuvent attendre pour entrer dans l’écluse, avec à leur bord des capitaines dont l’expérience de navigation varie autant que la taille de leur embarcation. L’éclusier place et dirige les bateaux dans l’écluse de la façon la plus sécuritaire et efficace possible. Cela signifie qu’il doit connaître la taille exacte de l’écluse et des bateaux entrants afin de les positionner sans se tromper. Imaginez un jeu de Tetris, mais avec des embarcations! La communication entre les capitaines et les éclusiers se fait par radio VHF, par téléphone ou simplement en les interpellant du quai par un « Bateau noir, c’est à vous d’entrer! Bateau bleu, c’est votre tour! ».
Le métier d’éclusier… au fil du temps
Saviez-vous que le métier d’éclusier n’a pas beaucoup évolué au fil du temps? Ses tâches demeurent essentiellement les mêmes qu’il y a 150 ans, bien que les conditions d’emploi aient grandement été bonifiées.
Par exemple, au canal de Chambly, les employés habitaient dans une maison fournie par l’employeur jusqu’au début des années 1900. Comme la maison voisinait l’écluse, le personnel était disponible pour écluser les barges en tout temps et au besoin, de la fonte à la prise des glaces.
Il n’était pas question de compter ses heures et il fallait faire preuve de la plus grande dévotion pour fournir une telle prestation de services.
Un savoir-faire qui se transmet
À ses débuts comme éclusier à Parcs Canada en 1980, Richard Surprenant, maître-éclusier au Canal-de-Lachine, remarque que les éclusiers de cette époque semblaient tous être dans la cinquantaine avancée.
À force de les côtoyer et de discuter avec eux, il finit par comprendre que la majorité de ses collègues de travail était en fait des vétérans qui avaient obtenu ce travail en guise de reconnaissance des services rendus pour le pays. À leur contact, Richard se familiarise avec son nouveau métier et ses nombreuses subtilités.
Ces anciens vétérans cumulaient en moyenne environ vingt ans d’expérience chacun et lui ont généreusement transmis leur savoir-faire. Être éclusier ne s’apprend pas dans les livres, mais se transmet plutôt d’une génération à l’autre.
Un métier exigeant
Le début des années 1980 fut une période particulièrement achalandée, où il n’était pas rare d’écluser plus de cent bateaux par jour durant le mois de juillet au Canal-de-Chambly; l’horaire de travail y était particulièrement exigeant. Inutile de dire que les éclusiers passaient beaucoup plus de temps avec leurs collègues qu’avec les membres de leur famille immédiate.
Bien qu’aujourd’hui l’automatisation de la majorité des postes de travail facilite la tâche et que les journées de travail soient plus courtes, le métier reste exigeant. En plus d’effectuer les opérations d’éclusage, il faut aussi s’occuper de toutes les tâches d’entretien des sites. Peu importe la météo du jour, le travail ne manque jamais!
Au canal de Chambly, un métier encore plus rare existe toujours : celui de pontier. Le canal est le seul où les ponts qui l’enjambent sont toujours tournants ou levants. Le pontier opère le pont et gère la circulation automobile lors du passage des bateaux. Pour les pontiers, qui travaillaient toujours en solo jadis, l’isolement finissait par peser lourd après quelques mois et la fin de saison n’arrivait jamais assez vite, pour certains d’entre eux.
Le métier d’éclusier, complexe et fascinant, mérite d’être mieux connu et l’expertise de celles et ceux qui le pratiquent mérite d’être reconnue. Du côté de Parcs Canada, les éclusiers se feront un plaisir du vous en dire plus sur leur métier et sur le lieu historique national que vous fréquentez. L’invitation est lancée. S’il s’agit d’une révélation pour vous, l’agence fédérale cherche à embaucher de nouveaux éclusiers chaque année. Restez informé en nous suivant sur Facebook (@CanauxQc)!
Portrait d’une éclusière, Myriam Coupal
Myriam considère qu’elle a la chance de faire partie de l’équipe qui opère cet « ascenseur à bateaux de plaisance » au lieu historique national du Canal-de-Saint-Ours, en Montérégie. Dans cette équipe, elle trouve la satisfaction de faire partie de l’histoire des voies navigables au Québec. Les éclusiers deviennent ambassadeurs de ces lieux en continuant leur entretien et en maintenant les opérations d’éclusage.
Myriam est éclusière au Canal-de-Saint-Ours depuis cinq ans. Selon elle, pour pratiquer ce métier, on doit aimer le travail à l’extérieur, bien supporter les chaudes journées d’été et vivre avec les intempéries. Un souci particulier pour le service à la clientèle hors pair est de mise ainsi qu’un intérêt pour un travail d’équipe axé sur la sécurité et l’amélioration continue. Tout au long d’un parcours d’éclusier, d’assistant à maître-éclusier, Parcs Canada offre un encadrement de qualité et de vastes possibilités de développement des connaissances techniques et personnelles.
Chaque été Myriam s’émerveille devant les embarcations de toutes sortes. Les plaisanciers font vivre des expériences marquantes, sont souvent enjoués et festifs, et n’hésitent pas à présenter leur famille et leurs animaux de compagnie. En partageant leurs histoires de navigation, ils permettent aux éclusiers de voyager avec eux. De manière générale, le public est intéressé et surpris de savoir que les voies navigables au Québec sont encore composées d’écluses fonctionnelles.
Les canaux ont accueilli une première femme dans leurs rangs en 1985. Puisque c’était un travail traditionnellement réservé aux hommes, les plaisanciers formulaient toutes sortes de commentaires, parfois assez inappropriés.
D’emblée, cette pionnière a pu compter sur le soutien de ses collègues et elle a trouvé le moyen de persévérer, pavant la voie aux éclusières comme Myriam. Aujourd’hui, il y a presque autant d’éclusières que d’éclusiers à Parcs Canada.
Portrait d’un éclusier, Indrek Romet
Travailler comme éclusier à Parcs Canada au canal de Sainte-Anne-de-Bellevue est, pour Indrek, un travail fantastique et dynamique, bien qu’il amène à vivre des moments difficiles et parfois essoufflants. C’est que cette écluse est la plus achalandée au Canada! Le temps de transit relativement court pour passer l’écluse et les attraits populaires de chaque côté du canal contribuent à l’achalandage élevé au canal.
Travailler comme opérateur d’écluse présente de nombreux avantages, notamment pouvoir être à l’extérieur par beau temps, échanger avec des visiteurs agréables et admirer les magnifiques vues et couchers de soleil. Finalement, les collègues de Parcs Canada sont tous de bonne compagnie et là pour s’aider, ce qui rend le travail encore meilleur!
Portrait d’un éclusier, Richard Surprenant
Richard Surprenant, maître-éclusier au lieu historique national du Canal-de-Lachine, a commencé sa carrière aux écluses de Chambly en 1980. En 2013, il rejoint l’équipe du Canal-de-Lachine où il poursuit sa carrière. Il a dû y mettre ses connaissances à jour, puisque le travail s’y effectue de façon différente, chaque canal ayant ses particularités.
Après 42 ans, Richard est toujours aussi passionné par son métier. Ce qui devait être au départ un emploi étudiant s’est finalement transformé en véritable carrière. Évidemment, c’est un métier qui est méconnu du grand public, mais c’est avec plaisir qu’il prendra le temps de vous expliquer en quoi consiste son travail. Selon lui, la profession aura toujours besoin de rayonnement et celui-ci viendra en bonne partie de ceux qui la pratiquent avec passion et dévouement.
Pour plus d’information, visitez le site parcscanada.gc.ca/canaux et suivez-nous sur Facebook!
Par Sébastien Noël, agent de communication et de partenariat
En collaboration avec Myriam Coupal, Indrek Romet et Richard Surprenant, éclusiers
Voies navigables au Québec, Parcs Canada
*Cet article a été publié dans le magazine numérique Vol. 45 No. 2 de Québec Yachting. Abonnez-vous, c’est gratuit!