Les niveaux d’eau – Une nouvelle réalité? – La suite
Je vous présentais une prévision pessimiste des niveaux d’eau pour le fleuve Saint-Laurent dans mon texte précédent. À l’hiver 2021-2022, les niveaux d’eau tendaient à nouveau vers la normale (voir le graphique révisé annexé). Les défis du réchauffement climatique ne sont pas pour autant amoindris, les domaines hydriques et terrestres sont intimement liés.
Il n’y a qu’à penser à ce qui s’est passé en Colombie-Britannique cette année. Les habitants d’Abbotsford dans la vallée du Fraser, par exemple, ont vécu une période de feux de forêt inhabituelle pour ensuite vivre une période d’inondation où plusieurs d’entre eux ont tout perdu, ont dû s’exiler et où plusieurs animaux de ferme sont morts. Les habitants de toute l’Amérique du Nord en ont subi les effets parce que des routes ont été fermées par le gouvernement britanno-colombien. Que penser de la période de grands vents en début décembre au Québec; la route 132 a été fermée sur la rive nord de la Gaspésie par le gouvernement québécois à cause du déferlement des vagues et de la destruction partielle de la chaussée.
Principalement, l’approvisionnement de masse en marchandises se fait via les plans d’eau importants et les ports; l’aide et la distribution parviennent par voies terrestre et aérienne quand ces dernières infrastructures ne sont pas affectées par les éléments naturels. La sécurité et la disponibilité avant tout!
Les problèmes de circulation ont été exacerbés avec la COVID-19, chaque gouvernement voulant protéger ses résidents; il a fallu des ententes particulières entre les gouvernements canadien et états-unien afin de permettre la libre circulation des travailleurs de produits essentiels et des aidants parce qu’ils devaient s’engager exceptionnellement sur des routes transfrontalières pour se rendre à destination.
Notre planète Terre est un « biôme », la gestion juste à temps (Just in Time) a réduit le nombre et la grandeur des entrepôts ainsi que les coûts de production de plusieurs marchandises. En revanche, il suffit que la disponibilité d’un intrant soit restreinte pour que le reste de la planète en souffre.
Un niveau d’eau très bas signifie pour les armateurs l’utilisation de navires moins grands avec des tirants d’eau moins importants ou l’abandon de certains trajets si leurs prévisions sont déficitaires et ne respectent pas les régulations locales. Une mauvaise condition météorologique adverse (ouragan, déferlement des vagues, etc.) signifie des casse-têtes et des tracasseries administratives supplémentaires pour les distributeurs ainsi que des délais allongés dans la livraison de la marchandise.
La clé pour amenuiser ces inconvénients de disponibilité est de se procurer dans la limite du raisonnable des produits et de prévoir des trajets alternatifs sécuritaires pour se déplacer lorsque cette règle est applicable.
Un écureuil amasse des réserves pour l’hiver sans pour autant toutes les utiliser; est-ce à cause de la surabondance de ses réserves ou parce qu’il oublie certains endroits où il en a cachées? À sa décharge, une réserve inutilisée deviendra un arbre et un puits de carbone. Mais nous, nous ne pourrons jamais rivaliser avec l’écureuil sur ce point sans contribuer de façon néfaste aux changements climatiques. Chaque personne a aussi ses limites financières pour emmagasiner des produits, c’est là que la gestion du risque entre en jeu.
Tout projet nécessite aussi un temps de préparation pour établir un plan alternatif advenant que votre choix de prédilection ne soit plus disponible au moment prévu. Meilleure sera votre préparation, meilleure sera votre réaction face à cette éventualité! Il nous appartient à tous de décider de la façon de réagir face à une situation donnée.
Bonne préparation pour votre prochaine saison.
Par Bernard Labrecque
Président de l’Association canadienne d’hydrographie, Section du Québec
bernard.labrecque@globetrotter.net
*Cet article a été publié dans le magazine numérique Vol. 45 No. 1 de Québec Yachting. Abonnez-vous, c’est gratuit!